Spiritualité

Le slametan à Java : une fête de quartier qui calme les esprits

Le slametan, un rite religieux

Au centre du système religieux javanais se tient un simple et furtif petit rituel : le slametan. Le slametan est la version javanaise de ce qui est peut-être le rite religieux le plus courant au monde, la fête communale. Et comme partout, cette fête symbolise l’unité mystique et sociale de ceux qui y participent. Ce rituel est célébré par des personnes aux idéologies très diverses, qui expriment des vues opposés sur Dieu, la révélation, l’Islam et la place des hommes dans l’univers. Le slametan forme en fait une sorte de lien social entre les différents groupes, il est le ciment de la vie sociale à Java.

Une cérémonie pour n’importe quelle occasion

Un slametan peut être organisé pour n’importe quelle occasion, dès lors qu’une personne dans la communauté en exprime le souhait. Naissances, mariages, décès, maladie, ensorcellement, mauvais rêves, récoltes, l’ouverture d’une usine, n’importe quel évènement peut occasionner un slametan. Même si tel ou tel élément de la fête peut varier selon la nature de l’évènement, la structure du rituel reste toujours le même. Il y a toujours le repas spécial, l’encens, le chant islamique et le discours toujours très formel de l’hôte. Et il y a toujours cette manière polie, embarrassée qui suggère que quelque chose d’important est en train de se passer.

La majorité des slametans se tiennent le soir, juste après le coucher du soleil et la prière du soir – pour ceux qui la pratiquent. Si le slametan est organisé à l’occasion d’une récolte, par exemple, l’hôte fait appel à un spécialiste religieux pour déterminer un jour propice selon l’interprétation numérologique du calendrier javanais. Si c’est pour un décès ou une naissance, l’évènement lui-même détermine la date.

Une fête exclusivement masculine

Les femmes passent la journée à cuisiner, et, pendant la fête qui est exclusivement masculine, restent à l’arrière dans la cuisine. L’hôte invite tous ses voisins à se joindre à la fête ; parents, amis, simple connaissance ou parfait inconnu, la sélection est entièrement territoriale. Les invités, appelés par un messager ou l’hôte lui-même (le plus souvent l’un de ses enfants), doivent tout laisser tomber et venir immédiatement. Une fois arrivé chaque invité prend place sur le parquet, assis à la manière traditionnelle javanaise, formant un cercle autour de la nourriture préalablement placée au centre de la pièce. Quand tout le monde est arrivé et que le cercle est complet, la cérémonie peut commencer.

L’hôte ouvre la cérémonie par un discours. Après avoir présenté sa profonde gratitude à ses invités pour leur présence, il explique la raison de cette réunion. Puis il demande à quelqu’un de donner la chanson-prière arabique. En réalité, la plupart des personnes présentes ne savent pas chanter, mais l’hôte fait toujours en sorte qu’un des invités le sache. Les préliminaires passés, le repas est servi à chaque participant, excepté à l’hôte qui ne mange pas. Après une quinzaine de minutes de silence – parler pendant le repas porte malchance – les invités rassasiés repartent, emportant avec eux les restes du repas qu’ils partageront plus tard avec leur famille.

Pourquoi les javanais organisent-ils des slametans ?

La première raison est sociale. Le slametan permet de se réunir, d’avoir des nouvelles de ses proches, rencontrer de nouvelles personnes, échanger des points de vue. Mais plus important encore, lors d’un slametan, tout le monde est traité de la même façon, riches et pauvres, jeunes et vieux… Personne ne se sent différent des autres. Le slametan crée donc un lien social très fort entre les individus d’une même région.

La seconde raison tient plus de l’ordre des croyances. Les javanais pensent qu’ils cohabitent sur terre avec de nombreux esprits. Le slametan sert à honorer ces esprits. L’encens et les arômes qui se dégagent de la nourriture sont considérés par les javanais comme la nourriture des esprits. Lors d’un slametan les esprits prennent part à la cérémonie, se nourrissent puis laissent les restes aux humains. Calmés, ils n’importuneront pas ces derniers qui pourront sereinement reprendre leurs activités une fois le slametan terminé.

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